Concerto-pour-la-main-morte

 

J’ai lu ce roman à sa sortie, je l’ai même dévoré. Depuis j’ai vu fleurir un concert de louanges à son sujet, je l’ai même offert, à plusieurs reprises, à des amoureux de la musique et de la littérature. Et moi je n’en ai pas parlé…

 

La rentrée littéraire approche à grands pas et je me dis qu’il est fort dommage de ne pas donner un nouveau coup de projecteur à ce roman de la rentrée dernière. Parce que c’est une bien jolie pépite, au charme fou… Qui fait voyager, donne à rencontrer des personnages romanesques comme je les aime, distille ça et là des moments de poésie pure tout en racontant une vraie histoire, de celles qui pourraient commencer par un « il était une fois »…

 

 

Car ce roman a des allures de conte. On y entre à pas feutrés et on se prend d’affection pour les personnages qui l’habitent et le hantent. Vladimir l’insatisfait qui rêve d’ailleurs. Une nouvelle vie loin de Mourava le village poubelle, ce bled paumé de Sibérie centrale où il végète par la force des choses. Mais cet ailleurs a un prix et les temps sont ce qu’ils sont. Et puis arrive le français. Un beau matin, par le bateau. Avec son piano… Colin le pianiste raté dont la main droite refuse d’obéir. Et qui bute, sans arrêt, sur le somptueux concerto n°2 en do mineur de Rachmaninov. Sans raison.

Colin s’installe chez Vladimir, déterminé à venir à bout de ce blocage. Ici sera l’endroit de la guérison, il le faut. Et il paiera Vladimir. Et Vladimir pourra partir. Enfin.

 

« Les artistes en Russie ont des rêves sublimes, ses ivrognes des rêves minables.

Qu’importe, ils rêvent tous. »

 

J’ai tout aimé dans ce roman. Sa belle musicalité, ses envolées poétiques, ses dialogues réjouissants, son côté « frappadingue » et bien sûr l’improbable rencontre. Cette autre rencontre, aussi, comme hors du temps, qu’il vous faudra découvrir… Une atmosphère presque irréelle, des paysages enneigés et silencieux, le cœur des hommes qui bat au rythme de la vodka qui coule dans leurs veines, et des rêves qu’on tente de rendre accessibles. Concerto pour la main morte est un petit bijou, un vrai roman, écrit dans une langue qui fait un bien fou. Sûrement pour ça que son souvenir est encore si présent à ma mémoire, des mois après lecture…

 

 

Les avis de Anne, Hélène, Jérôme, Philisine, Sharon, Un chocolat dans mon roman, Zazy, Yv…

 

Le blog de l’auteur

 

 

Premières phrases : « Le petit village se nommait Mourava, ce qui traduit de l’ancien russe donne à peu près « la jeune herbe ». Encore ne l’appelait-on « village » que par commodité, ou pour le distinguer d’autres plus frustes encore, parfois de simples campements qui s’échelonnaient sur de grandes distances le long du fleuve Ienisseï, région de Touroukhansk, Sibérie centrale. Il s’agissait en vérité d’un hameau très modeste, la réunion de quelques cabanes en amont d’un gué poissonneux, des baraques de bois et de goudron massées là comme l’est le sable au coude d’une rivière. Naguère, peut-être, un pêcheur avait tiré sa barque sur cette grève de cailloux, un chasseur écorché des zibelines sous ces sapins. Cela avait suffi à déposer dans cette solitude, sous la forme à jamais provisoire de rondins bruts et de planches mal équarries, quelques toits protégeant les villageois des rigueurs de l’hiver. »

 

 

Au hasard des pages : « Kolincherbo, pourquoi es-tu venu ici, à Mourava ? Tu es comme la météorite.

– La météorite ?

– Oui. Un caillou tombe du ciel, un étranger descend du bateau, ça n’a pas de raison. Tiens, comment tu parles russe ?

– Mes parents ont habité ici, quand j’étais enfant. A Moscou. J’allais dans une école de musique.

– C’est ça ton métier, la musique ?

– Oui. Je joue du piano. Et toi, qu’est-ce que tu fais ?

– Je ramasse les saletés. Ça ne manque pas, en Sibérie. »

Une pudeur retint Colin d’approuver franchement. Quand même, il laissa s’étirer un coin de sourire, du côté que le Russe pouvait voir.

« Allez, raconte encore ! le pressa Vladimir.

– C’est une longue histoire !

– Tant mieux. Il n’y a que deux façons de passer le temps, ici. C’est l’alcool et les histoires. » (p. 67-68)

 

 

Éditions Albin Michel (Août 2013)

240 p.

 

 

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Dernière lecture pour le challenge 3% Rentrée littéraire

chez Hérisson !

 18/18


16 commentaires

gambadou · 11 juillet 2014 à 10h00

Et bien tu as bien fait de revenir dessus, je le note tout de suite, il me fait diablement envie !

    Noukette · 12 juillet 2014 à 10h35

    Je me demande pourquoi j’ai attendu si longtemps…

jerome · 11 juillet 2014 à 10h32

Il y a un vrai souffle romanesque dans ce texte, tu as bien raison d’insister sur ce point. C’est pour cela que j’aime autant cet auteur, il ne se soucie pas des modes littéraires actuelles, c’est devenu tellement rare !

    Noukette · 12 juillet 2014 à 10h36

    Je le découvre avec ce roman mais je pense que je n’en ai pas fini avec cet auteur !

clara · 11 juillet 2014 à 10h57

Il me tente fichtrement!!!

Yv · 11 juillet 2014 à 11h01

Ps mal finalement d’en parler quelques mois après ça redonne envie de le lire. J’ai tout aimé également dedans, excellent roman

    Noukette · 12 juillet 2014 à 10h37

    Tout aimé aussi, un vrai bon roman comme je les aime !

Philisine Cave · 11 juillet 2014 à 15h03

C’est vria que c’est un vrai et chouette roman : je l’ai trouvé très sympa à lire. Bises

    Noukette · 12 juillet 2014 à 10h38

    J’ai vraiment passé un excellent roman avec ces personnages !

Aifelle · 12 juillet 2014 à 06h28

Je l’ai déjà noté a la suite de plusieurs billets positifs, je surligne.

    Noukette · 12 juillet 2014 à 10h38

    Chic, il le mérite ! Et c’est sacrément bine écrit, ce qui ne gâche rien !

Alex-Mot-à-Mots · 14 juillet 2014 à 12h38

Tiens, je ne l’avais pas noté l’année dernière.

Olivier Bleys, Concerto pour la main morte | Lettres exprès · 10 décembre 2014 à 17h00

[…] chez Anne, Hélène, Jérôme, Noukette, Philisine et […]

Olivier Bleys, Concerto pour la main morte – Lettres exprès · 18 mars 2024 à 15h38

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