Elle le voit au cœur du chaos, allure désinvolte, démarche dansante, il virevolte sa bombe de peinture à la main…
Il la photographie du regard en quelques secondes, sauvageonne en cuir vert, yeux en colère, un air de guerrière qui s’ignore….
Jeanne et Basile. Ils ne le savent pas encore mais leurs destins sont liés à jamais. Leur rencontre tumultueuse en pleine manifestation musclée scelle un pacte qui ne dit pas son nom. Le trouble. Le silence. L’évidence. Désormais ils ne seront plus jamais seuls…
Basile et sa drôle de famille. Celle qu’il s’est choisit. Jeanne aussi a choisi… « Elle veut faire partie de l’agitation, du grand Tout qui bourdonne : entrer dans la danse. Mais pas toute seule, non. La solitaire en elle se laisse amadouer par l’élan, par les autres. C’est nouveau et doux, mais pas seulement ; ça la remue aussi, comme une musique, et tout ça la traverse, pousse en elle à grande vitesse, parce que la graine y sommeillait depuis très longtemps. » Et la lutte prend un nouveau sens… Marc, Tonio, Ali, Jules, Lucie. Ensemble ils choisissent « une vie différente », loin des carcans et des conventions, loin des tyrannies qu’on leur impose ou de ces règles qu’ils refusent de suivre aveuglément. Vite, crier son envie d’autre chose, ouvrir les yeux, tout faire voler en éclats. Être libre, coûte que coûte, et avoir enfin le choix.
Vivre en meute, avec les copains. Aucun d’entre eux n’a été préparé à ça : élevés dans le respect de la propriété, dans la peur des lois, dans l’idée que passer de seul à plusieurs c’est fonder une famille. Payer son loyer, travailler. Et pourtant, Jeanne le sent : elle est prête depuis longtemps, elle n’attendait que ça. Ils n’attendaient que ça.
A sept, ils respirent mieux. Le squat est un refuge brinquebalant où chacun vient comme il est. Avec ses blessures parfois encore suintantes, ses bagages un peu trop lourds à porter, ses désillusions, ses espoirs un peu fous. Avec, toujours, cette liberté brandie en étendard, un peu comme une promesse. Ces « demains », toujours possibles… Et « ces fils qui les lient, la chaleur qu’ils en tirent. » D’abord silencieux, timide, fragile, l’amour de Jeanne et Basile prend racine dans le terreau fertile de l’amitié et s’épanouit dans le désordre de cette famille qui est désormais la leur…
Dans le désordre est un roman magistral. Le récit d’un combat qui réunit des êtres que tout oppose. Le portrait d’une jeunesse lumineuse et rageuse qui entre en révolte aussi bien envers la société qu’envers elle-même… Car doucement, lentement, chacun des personnages fait sa propre révolution au contact des autres. Une révolution intime, profonde, nécessaire. Et bon sang qu’ils sont beaux ces personnages… Tellement difficile de les quitter, tellement difficile de tourner cette dernière page et de les voir s’éloigner. Marion Brunet a le talent fou de nous les rendre vivants. Ils ont le courage des innocents. La force de leurs vingt ans. Leurs fondations sont fragiles mais ensemble ils sont prêts à affronter toutes les tempêtes, à essuyer toutes les averses… quitte à en payer le prix fort.
Il y a tout ce que j’aime dans ce roman. De la rage, de l’espoir, de l’amour, un cœur qui bat… Des larmes. Des silences… Des lendemains qui chantent et des gueules de bois dont on ne se relève pas. Des papillons dans le ventre et des envolées de corbeaux. Sublime.
Une nouvelle pépite jeunesse (mais pas que…) que je partage avec Jérôme, comme chaque mardi ou presque…
Jeanne le voit clairement à présent : chacun d’entre eux est devenu les autres. Ils faisaient groupe déjà, nombre aussi ; ils sont devenus unité. Non que leurs personnalités aient changé, ou qu’ils aient perdu de vue qui ils étaient séparément ; mais ils se sont déversés en chacun, à tour de rôle et tous ensemble, pour former ce bloc, cette entité dure et pourtant si fragile du Nous.
Le groupe
La bande
La famille
Le nœud
La meute
Ils sont là.
Ils sont vivants, et jamais ils ne l’ont été de manière aussi palpable. Ça circule dans leurs veines, leurs regards parlent pour leurs bouches, leurs mots ont un sens commun, leurs peaux vibrent à l’unisson.
Éditions Sarbacane (Janvier 2016)
Collection Exprim’
256 p.
Prix : 15,50 €
ISBN : 978-2-84865-820-9
22 commentaires
Marguerite · 8 mars 2016 à 03h00
« Il y a tout ce que j’aime dans ce roman. De la rage, de l’espoir, de l’amour, un cœur qui bat… Des larmes. Des silences… Des lendemains qui chantent et des gueules de bois dont on ne se relève pas. Des papillons dans le ventre et des envolées de corbeaux. Sublime. »
Ta manière d’en parler est toute aussi sublime ! C’est très beau Noukette et ça donne sacrément envie ! Je note bien évidemment.
Noukette · 6 avril 2016 à 23h20
Merci beaucoup Marguerite… Tes mots me touchent beaucoup… ♥ Je te souhaite une belle lecture…!
Framboise · 8 mars 2016 à 09h12
ayé c’est commandé ! On peut pas passer à côté, vos billets, sacrebleu, m’ont laissée KO 😉 Ce livre il le faut !
Mille baisers ma copine <3
Noukette · 6 avril 2016 à 23h21
Et je savais que ce roman te tourneboulerait….! Quel trésor…! ♥
krol · 8 mars 2016 à 09h39
Faut arrêter de lire des romans marquants ! Je n’arrive plus à suivre !!!
Noukette · 6 avril 2016 à 23h21
Celui là, tu ne peux pas passer à côté…!
Alex-Mot-à-Mots · 8 mars 2016 à 10h41
Encore une fois, vous êtes unanimes, et encore une fois, je le note pour mes ados.
Noukette · 6 avril 2016 à 23h21
Tes ados ont bien de la chance !
jerome · 8 mars 2016 à 12h26
Il est superbe ce roman. On a bien fait de prendre le temps de lire, de la savourer et de le partager ensemble, un vrai bonheur !
Noukette · 6 avril 2016 à 23h22
C’était le bon moment je crois…! Quelle claque ! ♥
celina · 8 mars 2016 à 14h37
Ravie de lire une critique aussi enthousiaste ! J’avais relevé ce titre mais je me demandais…Là, je n’hésite plus, je fonce !
Noukette · 6 avril 2016 à 23h22
Ce roman mérite vraiment toutes les distinctions qu’il accumule ! Magnifique !
folavoine · 8 mars 2016 à 19h16
3è -lycée ?
Noukette · 6 avril 2016 à 23h23
Complètement !
manU · 8 mars 2016 à 22h04
C’est noté, forcément !
Noukette · 6 avril 2016 à 23h23
Sage décision ! ^^
Philisine Cave · 12 mars 2016 à 21h57
Marion Brunet m’a tellement alpaguée avec sa Frangine que je suis prête à la suivre sur une autre œuvre.
Noukette · 6 avril 2016 à 23h23
J’en mets ma main au feu, tu vas adorer !
Marion · 14 mars 2016 à 16h07
Je suis sûre qu’il me plairait ce roman ! Je le note 🙂
Noukette · 6 avril 2016 à 23h24
Je vois mal comment tu pourrais ne pas aimer !
Marion · 15 mars 2016 à 09h41
J’aime bien Marion Brunet d’une manière générale.
Du coup je note ce titre là !
Noukette · 6 avril 2016 à 23h24
Tu peux même le surligner !!! A ne surtout pas manquer !