Ça fait quel bruit l’enfance quand ça s’en va…? Ça fait comment quand tu te prends le monde en pleine face, que c’est pas beau à voir, presque aussi moche que toutes les images et les envies morbides qui tournent en boucle, là, et ne te laissent jamais tranquille…? Ça prévient jamais la douleur… quand ça lacère profond… quand ça te coupe le souffle… quand ça s’enfonce toujours un peu plus pour te clouer au sol et t’empêcher de rejoindre le petit peu de lumière qu’il doit bien y avoir encore quelque part…
Il se passe un truc sale quand on grandit. Un voile de poussière, qui ternit et complique les choses.
Sacha est à la dérive. Lentement, à petit feu, il se laisse couler jusqu’à toucher le fond. Il a déjà mal ça ne sert plus à rien qu’il s’en fasse plus. Ça s’anesthésie la douleur. A coups de pilules. A coups de nicotine et d’alcool. Tout à la fois après tout on s’en fout. Et puis ça aide à tenir droit, à donner le change même si personne n’y croit…
Mais ce soir Sacha fait son retour dans le monde. Pour sa sœur jumelle qui le pousse à renaître et lui donne les ailes qu’il avait brisées. Pour ses amis du lycée qu’il revoit pour la première fois depuis longtemps. Pour Elle, tout Elle, sa peau, sa voix et tout son être… et tous les souvenirs qu’ils ne partagerons peut-être jamais. C’est Halloween… Les masques tombent… Les vrais visages se dévoilent… Les peaux se frottent et s’électrisent… La douleur insidieuse fait silence, mais est toujours aussi vive… Et les démons… ceux du dedans… ceux qui vous entrainent vers le fond… dansent la sarabande…
La vie, c’est un truc dont on ne se sort pas.
J’ai refermé PLS avec l’envie viscérale de rembobiner le film. De tout reprendre au début. L’envie aussi de prendre Sacha par la main, cœur et corps en pièces, d’effacer ce sang de carnaval sur son visage pour que coulent les larmes qui libèrent. Je découvre Joanne Richoux et son talent indécent. Et instantanément, j’ai ressenti pour elle ce que j’avais ressenti pour Antoine Dole quand j’ai découvert son univers. Ils ont un truc ces deux là. Un truc qui vous scotche. Un don sûrement. Les phrases acérées de Joanne Richoux, ses fulgurances d’écriture, ces silences que ses mots ont fait naître en moi à chaque fin de chapitre… Ce besoin de souffler. De reprendre un peu d’air…
J’aime qu’un roman me laisse KO debout. J’aime quand ça sent l’urgence. Quand ça cogne et quand ça frappe. J’aime ces écritures au scalpel qui laissent les chairs à vif… PLS est un texte incarné, écorché, vrai. Un texte qui ne se dérobe jamais et nous fait sentir furieusement vivant. Intense, brut, triste et beau à pleurer ♥
Un uppercut partagé avec Jérôme, comme (presque) chaque mardi.
L’avis de Lucie
Éditions Actes Sud junior (Février 2020)
96 p.
Prix : 13,00 €
ISBN : 978-2-330-13099-2
8 commentaires
Satine's books · 18 février 2020 à 09h51
Un roman bouleversant et qui m’a fichue une sacrée claque !
Joanne Richoux a un don, c’est indéniable, pour écrire sur la vraie vie.
Alex-Mot-à-Mots · 18 février 2020 à 11h53
Tu as donc sortie tes mouchoirs ?
krol · 18 février 2020 à 17h50
Quand vous écrivez des billets comme ça, ça me perturbe parce qu’il va falloir que je le trouve à la bibliothèque, je n’achète quasiment jamais de livres ados, et que ça va pas être demain, et qu’entre temps j’aurais oublié. Pfff ! Ma vie est dure !
Jérôme · 19 février 2020 à 15h23
Beau et triste à pleurer, c’est exactement ça. Quelle claque !
Amandine · 22 février 2020 à 09h33
Comment résister à cet avis dithyrambique?!
LUCIE · 22 février 2020 à 10h52
oh mon dieu oui quelle claque. J’aime ton expression « qu’on me laisse ko debout ». Sacrée auteure, plume de dingue.
Philisine Cave · 22 février 2020 à 13h20
Comme Jérôme, tu en parles divinement bien mais je n’arrive pas à me motiver à découvrir cette histoire sombre.
Karine · 22 février 2020 à 19h27
Ça semble bouleversant…je vais tenter de le trouver…