Le grand vide. Le grand blanc. Quelques nuages se forment et s’amoncellent, le silence est assourdissant. Presque un silence originel, celui qui précède la vie, l’homme, celui dans lequel on est plongé à nouveau après l’extinction de l’humanité toute entière… Plus rien de vivant. La Terre n’est qu’un souvenir. Les humains aussi. Dans le grand Néant, plus rien ne subsiste. Rien sauf Adam. Adam est un programme, une conscience pure… une intelligence artificielle seule garante de ce que l’homme a été, a construit, a détruit… Il est le gardien des souvenirs, le seul à posséder en ses entrailles la totalité des data générées par une humanité disparue. Seul dans sa capsule, sans même savoir qui il est vraiment ni à quoi il ressemble, Adam erre dans l’infinité de l’espace avec pour seul compagnon de route un programme conversationnel qui tente de répondre à ses interrogations…

Adam se demande bien pourquoi on lui a autorisé toutes ces pensées. Il est le gardien du phare, celui qui veille sur un protocole qui sonne comme une promesse un peu folle : que la vie renaisse, un jour, si tant est qu’on retrouve les conditions propices à ce miracle… Au centre de la capsule, un cerveau-noyau. 602,214 zettaoctets de mémoire… la totalité de la data du monde jusqu’au moment du grand Deuil… les restes de l’ancien monde. Adam peut visiter la mémoire du cerveau-noyau à l’infini, s’imprégner du monde qui n’est plus sans savoir si ces données pourront être transmises un jour…

Quelque temps avant la fin, que tout le monde savait inéluctable, beaucoup s’étaient plongés dans la philosophie… ceux qui étaient déjà philosophes se mirent à écrire de la poésie… et pour ceux qui étaient déjà poètes, il n’y avait pas mieux. Eux, au moins, étaient un peu plus préparés. Peut-être certains se sont tus, et ont pu voir alors le grand Deuil en face. Moi avec mon éternité, j’aurais tout le temps de me préparer si je savais à quoi. Je n’ai pas d’autre choix que d’aller de l’avant… comme les nuages. Eux ne reculent jamais.

Wow…! Suite et fin du diptyque formé avec Deep me lu l’année dernière.. Décidément, Marc-Antoine Mathieu ne ressemble à aucun autre. L’expérience de lecture est là encore vertigineuse tant elle nous emmène à réfléchir sur nous, notre monde et son évolution probable vers sa propre finitude. Ça bouscule les neurones, on cogite beaucoup. Intelligence artificielle, humanité, conscience, vie et philosophie… laissez vous porter… Vous en ressortirez sûrement avec plus de questions que de réponses mais vous n’oublierez pas le voyage…! Intelligent et bluffant !

Du même auteur sur le blog : 3 secondes

Deep it de Marc-Antoine Mathieu
Éditions Delcourt (Janvier 2024)
112 p. / 19,99 € / ISBN : 978-2-413-08162-3

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8 commentaires

Natiora · 7 février 2024 à 08h17

Je ne serais sans doute pas allée vers cette BD spontanément, ta conclusion me donne envie d’aller y mettre le nez quand même.

Blandine · 7 février 2024 à 09h08

Je n’ai pas souvenir du premier mais ce que tu dis là me donne vraiment très envie de découvrir ce diptyque !!

Nathalie · 7 février 2024 à 09h29

Une expérience de lecture étonnante visiblement ! Pourquoi pas, je suis curieuse.

eimelle · 7 février 2024 à 15h58

tu as l’art d’attiser la curiosité! A découvrir alors!

Katell · 7 février 2024 à 19h59

Ton billet m’a convaincue. J’aime ces histoires post-apocalyptiques et le traitement d’un monde disparu dont la seule mémoire est une IA, Adam, est intéressant. Comme l’a été le film de « A.I. Intelligence artificielle » de Spielberg (2001!!)

gambadou · 9 février 2024 à 21h12

Comme Natiora, je n’aurais pas spécialement été vers cette BD, mais tu donnes envie.

Mylene · 11 février 2024 à 07h45

je note mais je ne suis pas sûre que j’apprécie donc je verrai si je la croise…

Hilde · 11 février 2024 à 15h06

J’aime bien les nouvelles expériences de lecture, je prends note. J’espère juste ne pas me perdre dans des réflexions philosophico-technologiques un peu nébuleuses.

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