J’aurais peut-être dû faire attention à ton cœur, quand tu me l’as collé dans les bras. Je l’ai piétiné, et ça ne se fait pas – même à petits pas précautionneux, on n’a pas le droit ; on ne brise pas les cœurs, voilà. Je suis désolée. Peut-on briser un cœur avec douceur ? Ça m’a semblé un processus si naturel, je n’ai pas dû l’inventer.

Zut, c’est atroce : j’ai encore l’air de me moquer. Est-ce que je suis une bitch de ne pas t’aimer ? D’être épuisée, soûlée, gavée de ta vénération fanatique ? Tes regards, à force d’insister, m’ont usée ; tes bises appuyées m’ont décapée, irritée. On ne demande pas aux gens l’autorisation de les aimer, peut-être qu’on devrait.

J’ai une tendresse particulière pour toutes ces histoires d’amour qui ne naîtront jamais. Ces mots doux qui resteront en cage, enfermés dans des cœurs brisés. Ces déclarations qui resteront lettre morte et que personne n’entendra jamais. Ces petits frémissements qui auraient pu être le commencement de quelque chose mais n’en seront jamais…

J’ai une tendresse particulière pour ces « je t’aime, moi non plus » à peine murmurés, ces non demandes en mariage qui ne s’inscriront jamais sur aucun parchemin. Ces amoureux transis, incompris, malmenés qui se meurent d’amour en silence et sans bruit. Ces chevaliers servants sans cavalière, ni cavalier…

tu me plaisais presque,

mais pas.

Dire l’amour mais aussi ne pas le dire. Le crier, le murmurer…. mais parfois préférer l’étouffer. Il y a des mots qu’on préfèrerait ne pas entendre, des lettres d’amour sublimes qui resteront enfermées dans un tiroir sans jamais avoir été lues. Alors que dire à ces amoureux éperdus qui attendent un signe, un geste..? Les caresser, les rassurer… ou ne rien leur cacher au risque de les briser ?

Aimer follement tous ces amoureux qui ne le sont pas en retour. Et puis, ne pas vouloir dire l’amour… c’est quand même le dire un peu non..? Yliès aime Pénélope. Pénélope n’aime pas Yliès. Enfin si, mais pas comme il le voudrait. Alors peut-être qu’elle aurait dû… qu’elle aurait pu… qu’elle aurait mieux fait de… mais le mal est fait. Et une lettre – sincère autant que possible – c’est finalement le plus beau cadeau qu’elle puisse le offrir.

Elle est belle cette lettre, pétillante et légère, grave et cruelle aussi un peu, à l’image des amours adolescentes qui se vivent pleinement et ne prennent jamais de gants. Un pas de deux, à contretemps et virevoltant, partagé avec Sabine

La lettre de Moka

Le blog de l’autrice

Lettre à toi qui m’aimes de Julia Thévenot

Éditions Sarbacane (Avril 2021)

144 p. / Prix : 12,50 / ISBN : 978-2-37731-599-4 


4 commentaires

Sabine · 3 mai 2021 à 06h58

je te love toi tu sais

Didi · 3 mai 2021 à 08h28

Coucou et bien voilà j’ai la chanson de JJ Goldman dans la tête
J’ai une tendresse particulière pour ces filles qui font pas de manières 🎶 bisous 😇

Jérôme · 9 mai 2021 à 09h59

L’amour c’est surfait non ? :p

Marie Lopez · 14 septembre 2023 à 11h24

Les intrications de l’amour, les non-dits et les regrets sont dépeints avec une sincérité émouvante. Les histoires d’amour avortées sont souvent les plus poignantes. Cette lettre est un précieux cadeau, même si la douleur qu’elle renferme est palpable. Bravo pour cette introspection franche et sensible.

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