Quelques secondes encore. Juste le temps d’essayer d’y croire, de faire comme si tout ça n’était qu’un mauvais rêve à chasser à coups de sourires…

Quelques secondes encore. Le temps de faire entrer en grand les souvenirs des jours d’avant, tous les petits bouts de rien, les lambeaux de douceur, les silences partagés et les éclats de rire…

Quelques secondes encore. Parce qu’on ne peut pas laisser comme ça derrière soit dix-sept ans d’amour. Ses yeux sont juste fermés, peut-être même qu’il dort, ne faites pas de bruit…

Glaner encore quelques instants sur ce qu’on ne peut pas dire. Parce que le dire ça serait l’accepter. Et accepter la mort d’Alban est impossible, écoute, tu l’entends son cœur qui bat..? Alors il faut égrainer les moments doux, mettre à nu ce qui toujours restera de lui. Pause. Arrêt sur images. Quelques secondes encore…

Je cherche le roux de tes cheveux sous le bandage qui redessine ta tête. Je cherche du flamboyant pour maman. Je cherche mon frère encore et encore. Je te cherche parce que tout s’accélère. On ne restera pas toujours ici. Ils veulent une réponse. Tout se bouscule pour nous, tu sais. Et je me suis fait une promesse. Une promesse pour notre mère : dresser ce qui te rend vivant.

J’ai collé dix-huit petits marque-pages dans ce texte qui en fait à peine soixante… J’aurais pu en mettre le double. Je me suis tenue là, silencieuse, près du lit d’Alban, Alban qui n’est presque plus là mais est tellement présent. « On doit savoir, madame. Quels organes ? … Tous ? Certains ? C’est à vous de choisir… ». Cette course contre la montre. Et les mots d’Anouk, la sœur d’Alban, pour tenter de convaincre sa mère en convoquant dans cette froide chambre d’hôpital une grande brassée de beau. De vie.

Et les mots de Thomas Scotto nouent le présent et les souvenirs dans une rythmique qui s’accorde au cœur du lecteur, qui bat, qui bat… Il n’en faut pas plus. Et se dire que, décidément, quand l’émotion est si palpable, quand on arrive à ce point à mettre des mots sur la douleur, avec ce qu’il faut de pudeur et de délicatesse… on a affaire à de la bien belle littérature ♥

Une lecture comme un cœur qui bat, partagée avec Jérôme.

Le site de Thomas Scotto

Maman doit penser à toi. Si elle ne pense qu’à toi, elle prendra forcément la bonne décision : t’offrir à d’autres.

Quelques secondes encore de Thomas Scotto

Éditions Nathan – Collection Court toujours (Février 2021)

64 p. / 8,00 € / ISBN : 978-2-09-249044-0 

pepites_jeunesse


8 commentaires

Isabelle Azzoun · 15 juin 2021 à 00h22

Une envie de lire ce livre. Tout de suite. Comme en écho à « Réparer les vivants » de Maylis de Kerangal. Même si l’argument n’est pas du tout le même, et les choses vues sous un angle complètement différent. Oui, envie de lire cet ouvrage…

Alex-Mot-à-Mots · 15 juin 2021 à 13h01

Merci pour cette pépite.

Blandine · 15 juin 2021 à 14h29

Je note!

Amandine · 16 juin 2021 à 12h40

J’ai très envie de découvrir cette pépite !

krol · 16 juin 2021 à 15h53

Comme je le disais chez Jérôme, c’est un sujet casse-gueule, on peut vite tomber dans le larmoyant. Vous m’avez donné très envie de le découvrir.

Fanny · 23 juin 2021 à 21h39

Qu’est-ce qu’il me fait envie…

Jérôme · 23 juillet 2021 à 15h32

Terrible ce petit roman, lumineux et terrible !

Mag · 30 décembre 2021 à 15h47

Tranquillement , je me prépare ma petite liste de lectures en farfouillant chez toi, comme souvent…je tombe sur ce billet et pleure doucement. Je ne suis pas complètement prête pour cette lecture mais bravo pour ce billet qui touche en plein cœur!

Laisser un commentaire

Emplacement de l’avatar

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *