Lui, il a fait un pas de côté, il a ouvert des portes… Il y a des pays où les mecs portent des jupes, et ça fait chier personne. On les prend pas pour des filles, on les traite pas comme des filles. Alors pourquoi on peut pas faire la même chose ici ?

Et puis y’en a marre de ce traitement de défaveur, toujours. Comme si en étant une fille, on était moins qu’un mec, comme si on valait moins. Est-ce qu’il faut accepter ça sans bouger ?

Parce que merde, au début du XXe siècle, les premières femmes qui ont porté un pantalon en public… qui se sont coupés les cheveux courts… qui ont conduit la première voiture… elles avaient un sacré courage. Mais elles l’ont fait. Merde, oui, elles l’ont fait. Un pas de côté, vers du meilleur.

Un matin, Robin arrive en jupe au lycée. Pas par pure provocation, ni parce qu’il a perdu un pari. Pas non plus pour être le centre de l’attention ou revendiquer quoi que ce soit. Juste parce que ça lui plait. Cette jupe, elle lui avait tapé dans l’oeil lors de ses vacances à Londres, et il faut dire qu’elle lui va plutôt bien.

Devant la grille du lycée où l’attend Jade, sa petite amie, les commentaires se font d’abord en douce et en sourdine. Quelques doigts pointés, de l’étonnement, des rires, un peu d’admiration aussi, à vrai dire, Robin ne s’attendait pas à passer inaperçu. Mais passé l’effet de surprise, il pensait bêtement qu’il cesserait d’être observé comme une bête de foire. Avec ou sans jupe, Robin reste Robin, un type bien dans sa tête et dans ses baskets, populaire juste ce qu’il faut. Ses amis, les vrais, le savent bien eux. Mais autour de lui, des voix s’élèvent, des poings se serrent…

Je veux être craquant.

Je veux que tu m’aimes Jade, de haut en bas.

Je veux pleurer.

Je veux être viril.

Je veux être bien dans la rue.

Je veux me foutre du dehors, de ce qui pourrait me faire une barrière.

Je veux ouvrir toutes les portes.

Je veux choisir mes saisons.

Je veux être un homme, quand je serai un homme.

Je veux que chacun s’occupe de soi.

Je veux que vous soyez contents. Ça va, tout va bien, je suis bien.

Alors c’est peut-être temporaire ou c’est peut-être pour longtemps. Mais là, j’en veux d’autres. D’autres jupes, je vais en porter. Parce que le noir ça va avec tout.

Un texte court et percutant créé par trois auteurs chouchous lors d’une résidence de création. Mélange de récit, de dialogues et de pensées intimes des personnages, le texte de Cathy Ytak, Thomas Scotto et Gilles Abier se déploie et gagne en intensité au fur et à mesure de la lecture jusqu’à ce formidable épilogue. Un crescendo, comme un écho aux réactions vives et extrêmes que suscite la jupe de Robin…

Va te changer réaffirme avec force le droit à la différence. Le droit à être soi. Un texte pour faire barrage à l’ignorance et crier haut et fort qu’on peut exister en dehors de son « sexe ». Faire cohabiter en toute simplicité le masculin et le féminin. Fissurer davantage les barrières du genre imposées par la société. Une pierre de plus pour un monde plus ouvert capable d’accepter l’autre dans sa différence.

 

A dire, à partager, à porter. Intensément ♥

Une pépite jeunesse lue en duo avec Jérôme, comme (presque) chaque mardi.

 

Le site de L’atelier du Trio

 

Éditions du Pourquoi pas (Août 2019)

60 p.

 

Prix : 9,00 €

ISBN : 979-10-92353-54-9 

pepites_jeunesse

By Hérisson 


6 commentaires

Fanny · 19 novembre 2019 à 11h33

Ces trois-là ensemble ne peuvent que faire des merveilles!

Marie-Claude · 19 novembre 2019 à 16h51

Alors là, il me le faut. J’espère juste arriver à mettre la main dessus (je ne connais pas cette maison).

J’avais justement une discussion à ce propos avec l’ado d’une amie. Pourquoi, l’été, lorsqu’il fait une chaleur à crever, un garçon ne pourrait-il pas mettre une robe soleil? Il faut avoir un sacré courage pour le faire… Et moi, j’ai beaucoup de misère, dans la vie, avec les «parce que ça ne se fait pas».

krol · 19 novembre 2019 à 20h44

Extrêmement tentant, il n’est pas facile de faire tomber certaines barrières.

manU · 19 novembre 2019 à 20h55

Merci pour la découverte !

Alex-Mot-à-Mots · 20 novembre 2019 à 10h29

Un sujet épineux, il fallait bien 3 auteurs.

Jerome · 27 novembre 2019 à 15h11

Avec un tel trio, on ne pouvait que succomber !

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