Je suis une chochotte. Du genre à tourner de l’oeil pendant une prise de sang, à appeler l’homme à la rescousse pour soigner les petits bobos des enfants et à fermer les yeux pendant les scènes tout juste sanglantes des séries même pas interdites aux moins de dix ans. Une chochotte donc. Si Helena avait été un film, j’aurais passé la moitié du temps agrippée aux accoudoirs et j’aurais sursauté le reste du temps. Il y a d’ailleurs quelque chose de très cinématographique dans l’écriture physique et âpre de Jérémy Fel. On les voit les champs de maïs, on la ressent la chaleur poisseuse du fin fond du Texas, on la sent l’odeur aigre douce du sang encore frais…
« Certains lieux devaient rester imprégnés
des drames qui s’y étaient déroulés. »
Avec Helena j’ai senti le coup venir dès les premières pages. Et quand vous aurez lu les premières pages vous comprendrez. J’aurais pu m’arrêter là, partir en courant et me rabattre sur un feelgood mais non. J’étais ferrée. Horrifiée mais piégée. Moins de trois jours pour lire plus de 700 pages, ceux qui me connaissent savent que ça relève de l’exploit. N’ayant pas lu son premier roman qui avait déjà fait grand bruit il y a trois ans, je me suis lancée à l’aveugle. Alors il a quoi de plus que les autres ce Jérémy Fel..?
Les personnages d’abord. Du genre qu’on n’oublie pas de sitôt. Complexes, ambivalents, sombres, caricaturaux jusque ce qu’il faut. Des « types » que Jérémy Fel se fait un plaisir de dézinguer bousculer… La mère parfaite, l’absente, le fils qui n’arrive pas à s’éloigner, le dexasé, la fille à papa, celle dont on a farci le crâne de rêves de gloire… Des personnages lambdas, humains… peut-être un peu trop… qui franchissent la ligne et sombrent dans l’indicible. Des personnages qui nous confrontent à cette part de nous capable du pire, ce côté sombre que l’on tente généralement de garder en sommeil mais qui se rappelle à nous, parfois, dans ces situations qui nous poussent dans nos retranchements…
Une atmosphère. Bien glauque derrière le vernis de façade. Un décor léché qui suinte le mal et nous procure cette inexplicable sensation de danger… Jérémy Fel nous y entraîne en nous tenant par la main et finit par nous la broyer sans ménagement. On réprime quelques hauts-le-coeur mais on tient bon. Parce que l’histoire est diablement efficace. Des plus sombres et des plus haletantes. Une histoire où rien n’est jamais tout blanc ou tout noir, où les liens entre les personnages se tissent aussi vite qu’ils se dénouent, dans la sueur et les larmes, dans les cris et le sang…
Sur la route écrasée de chaleur, j’ai croisé des âmes égarées, des monstres surgis de cauchemars, des souvenirs d’enfance meurtrie, des rêves fauchés en plein vol… Je n’ai pas marché j’ai couru. Sans relâche, échevelée, à bout de souffle. Et j’ai fini sur les genoux…
Une découverte choc de cette rentrée littéraire que je suis plus que ravie d’avoir partagé (et c’est une première !) avec La fée Sophie..
Les avis de Léa, Leiloona et Nicole, conquises.
Éditions Rivages (Août 2018)
733 p.
Prix : 23,00 €
ISBN : 978-2-7436-4467-3
By Hérisson
By Brize
23 commentaires
keisha · 24 août 2018 à 07h40
Que des avis enthousiastes, et des billets qui me montrent que … ce livre n’est pas dans mon créneau (bon, OK, je vais essayer quand même, il sera à la bibli). Et je ne suis pas une chochotte, quand ma mère a refait le sol de la cuisine avec son sang (rien de grave), j’ai assuré, tu t’assieds, tu bouges pas, tu comprimes, et j’ai pris la serpillière. A l’arrivée des pompiers, nickel, cool.
Kathel · 24 août 2018 à 08h27
Je ne suis pas trop chochotte, mais … j’avais tenté de lire Les loups à leur porte et pas accroché au style, à l’ambiance mortifère… aussi tu comprendras que je sois prudente !
hélène · 24 août 2018 à 09h11
Oula, tu me connais, je ne sais pas si c’est pour moi…
LaFée · 24 août 2018 à 09h54
Sur les genoux, en effet, mais ravie d’avoir partagé tout ça avec toi! Lire ce roman, c’est un peu comme monter dans un manège : on est secoué, on crie, on a un peu peur, mais c’est tellement gai d’échanger après avec notre voisin de nacelle 🙂
Aifelle · 24 août 2018 à 10h06
Il vient dans ma librairie en septembre, mais moi je ne serai pas là, dommage .. Visiblement c’est pas pour les mauviettes comme dirait l’autre, mais je ne sais pas si j’ai vraiment envie de ça en ce moment. A suivre ..
Leiloona · 24 août 2018 à 10h52
Hi hi. Team chochottes au rapport ! 😀
Céline · 24 août 2018 à 12h27
Hum hum je vais éviter pour ne pas emplir mes nuits futures de cauchemars !
krol · 24 août 2018 à 13h10
Moi qui adore les romans noirs, je crois qu’il est pour moi !
Alex-Mot-à-Mots · 24 août 2018 à 13h32
Il me le faut absolument !
nicolemotspourmots · 24 août 2018 à 15h15
Je ne suis pas chochote mais pas particulièrement portée sur ses références genre Stephen King et compagnie (encore moins cinématographiques) mais j’avoue que le bougre a un sacré talent !
Marie-Claude · 24 août 2018 à 15h16
Non mais… quel sublime billet.
Je l’attends avec impatience. Comme je ne suis pas chochotte pour deux sous, j’espère que mon investissement en vaudra la chandelle!!!
Didi · 24 août 2018 à 17h25
Déjà il va y avoir le choc de la rentrée tout court où il faut courir de partout et où on finit sur les genoux… Alors ce n’est peut-être pas la peine d’en rajouter :-O Je suis fatiguée d’avance moi …
Trêve de plaisanterie pourquoi pas cette lecture pour les nuits insomniaques de pleine lune…
Bises et … bonne fin de vacances et bon retour sur la blogosphère.
Moka · 24 août 2018 à 19h29
Quelque chose me dit que ce titre va beaucoup faire parler de lui…
Philisine Cave · 24 août 2018 à 21h37
C’est la grande force de ce roman : être lu en moins de trois jours malgré ces pages. Je pense que ce bouquin va connaître un énorme carton (du style de Joël Dicker avec son « Québert »). Il est déjà reconnu par les libraires Page. Je pense le lire, j’ai failli l’acheter aujourd’hui mais je dois éponger huit bouquins avant. Bises
Virginie · 25 août 2018 à 13h12
Je l’avais repéré, je le note !
l'or rouge · 25 août 2018 à 15h03
Trop glauque pour moi même si je comprends ton envoutement, on a parfois du mal à lâcher un texte horrifiant !
Natiora · 25 août 2018 à 15h58
En clair, il me le faut absolument !!
Autist Reading · 25 août 2018 à 22h13
J’aime me faire peur (même si je sue à grosses gouttes lors d’une prise de sang) et l’intrigue a l’air d’enfer !
sylire · 25 août 2018 à 22h25
Il me fiche la trouille mais je crois que je vais y aller quand meme.
jerome · 27 août 2018 à 13h53
On en a parlé ensemble, c’est sans doute super bien fait et d’une redoutable efficacité mais au final on reste dans le « divertissant » et je n’ai pas envie de ça en ce moment 😉
Brize · 31 août 2018 à 10h39
Je tenterais bien ! (et vu le nombre de pages, tu aurais pu le compter pour ton challenge pavé de l’été)
Nathalie · 18 septembre 2018 à 15h10
Oui mais bon, là c’est pas juste !! Évidemment que j’ai envie de le lire après un avis pareil… Je t’ai déjà parlé de ma PAL himalayenne ?
lcath · 28 septembre 2018 à 18h58
Je l’ai sur la table du salon qui attend ……