Quand Calypso a fait de ce roman un livre voyageur, j’ai tout de suite su qu’il était fait pour moi… Tellement de beaux billets ont fleuri sur la blogosphère pour parler d’Eugène et de ses vies extraordinaires que malgré son sujet difficile et douloureux, j’ai à tout prix voulu le lire. Cette lecture a été éprouvante, longue car entrecoupée de petites lectures « soupapes », c’était nécessaire, j’avais besoin de ces respirations. Ce livre va repartir vers d’autres lecteurs et poursuivre son extraordinaire aventure. Un très beau premier roman, incontestablement…
C’est un 23 novembre vers 20 heures qu’un « tsunami » a dévasté la vie du narrateur et de sa femme. A sa naissance six jours plus tôt, Eugène ne pesait que 1 kilo et 60 grammes. Né grand prématuré, trop petit, trop faible, il décède d’une infection au petit matin. « Eugène a-t-il existé même s’il n’a pas vécu ? » Depuis ce jour, la mère d’Eugène ne parle plus, puisqu’il n’y a rien à dire… Elle communique à l’aide de mots et de courtes phrases toutes faites écrits sur un petit carnet. Elle voit un psy trois fois par semaine qui parle à sa place et écoute son insondable silence. Et elle coud, inlassablement, des pantalons en velours rouge pour tous les âges de la vie d’Eugène.
Le père lui ne peut pas se taire, face à ce silence, il se doit de raconter l’histoire de son fils, il doit lui offrir cette parole pour qu’elle retrouve sa voix. L’Histoire de notre fils.doc…, mais qu’il y a t-il à dire sur Eugène, ce fils qu’ils n’ont même pas eu le temps de tenir dans leurs bras, d’embrasser ? Pourtant, Eugène a existé, il a été là, il faut lui redonner vie.
Interroger ceux qui furent proches d’Eugène, ceux qui l’ont connu, touché, comme Noëlle, infirmière en réanimation néonatale, ne suffit pas… Commence alors une véritable enquête pour savoir ce qu’aurait pu être la vie d’Eugène s’il avait vécu. « Plutôt que de buter sur cette infime existence qui prend si peu de mots à raconter, je vais écrire la vie qu’il aurait dû avoir. » Rosa, Véronique, Nour, Elie, Marvin, Victor, Fatoumata, Solal, le narrateur dérobe dans le bureau de la directrice de la crèche d’Eugène la liste et les adresses de ses petits camarades de jeux. Le plan du quartier scanné et punaisé au dessus de son bureau, le travail de recherche et d’investigation peut commencer, méthodique, précis, nécessaire…
Que dire sur ce roman si ce n’est qu’il est bouleversant, qu’il prend à la gorge… Mais curieusement, ce livre n’est pas que triste, il est lumineux, porté par une écriture sensible, pudique et touchante. La mère se tait, le père parle, et qu’elle est belle la voix de ce père ! Oui, j’ai souvent eu les larmes au yeux, mais j’ai aussi souri parfois… Écrit comme un journal intime, l’histoire d’Eugène couvre un an de vie sans lui et se termine par la lettre bouleversante et magnifique de la mère à son fils. Je ne sais pas quoi vous dire de plus sur ce très beau roman, lisez-le si vous le pouvez et si vous vous en sentez la force, vous n’oublierez pas Eugène de sitôt…
Le billet de George m’avait énormément touché de même que celui de Clara qui n’a pu terminé sa lecture… Plein de billets magnifiques sur ce livre qui l’est tout autant, celui de Calypso bien sûr, une des toutes premières à en avoir parlé, ceux de Stéphie et Pimprenelle qui en avaient fait une Lecture du Dimanche, mais aussi ceux de Mango, Restling, Lasardine, Valérie, Keisha,…
Premières phrases : « J+26 (19 décembre) Je pourrais parler de Carla Bruni. Il semble que son histoire avec le président de la République a commencé ce soir-là. C’est une coïncidence évidemment, n’y voir aucun complot sarkozyste. C’était juste un dîner chez Jacques Séguéla. Il fallait distraire un ami récemment divorcé. Carla, Luc, Marie-Caroline, à vos agendas, retrouvons-nous le 23 novembre vers 20 heures, espérons un coup de foudre, Nicolas ne supporte pas de dormir seul. Ce jour où, en silence, un tsunami a renversé notre vie. »
Au hasard des pages : « Ça va faire trois mois maintenant. Nous nous installons dans la vie sans notre enfant. C’est-à-dire exactement la même qu’avant sans la légèreté. Je me sens vieux. Je regarde les photos de la grossesse, une chaque jour depuis la première échographie. Cent vingt-quatre en tout. Il y a plus de photos de lui dans le ventre de sa mère que de lui après la césarienne. La tête en bas, en haut, le ventre rond, en gros plan ou caché par un dessin, noir et blanc ou couleurs saturées, mes mains presque toujours au même endroit, de chaque côté du ventre. Nos visages sont lisses, nos yeux brillants. Je ne nous reconnais pas. » (p. 56)
Éditions JC Lattès (Août 2010)
232 p.
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30 commentaires
Commentaire n°1 posté par George · 4 octobre 2010 à 09h23
aujourd’hui j’ai mis en ligne sur mon blog un entretien avec Isabelle Monnin qui a bien voulu répondre à quelques questions !
http://leslivresdegeorgesandetmoi.wordpress.com/2010/10/04/entretien-avec-un-auteur-isabelle-monnin/
je trouve que ces réponses éclairent bien le roman !
Noukette · 5 octobre 2010 à 22h54
Merci beaucoup George, je vais vite aller voir ça ! 😉 Quelle chance d’avoir pu l’interviewer !
Commentaire n°2 posté par lasardine (lrdpi) · 4 octobre 2010 à 09h30
une magnifique lecture pour moi!! j’ai beaucoup aimé!
comme tu dis, on sourit quand même plusieurs fois! ce roman qui parle d’un sujet pourtant si délicat n’est pas sombre, non!
moi non plus je ne suis pas près d’oublier Eugène!!
Noukette · 5 octobre 2010 à 22h59
Je viens de rajouter un lien vers ton billet dans le mien ! Je viens de le lire, je ne l’avais pas trouvé en rédigeant mon article ! 😉 Mon ressenti est assez similaire au tien en fait, c’est vrai, c’est un beau premier roman !
Commentaire n°3 posté par keisha · 4 octobre 2010 à 09h51
je voulais te signaler le billet de george aujourd’hui, bon c’est fait!
Tu vois, c’est un beau roman.
Noukette · 5 octobre 2010 à 23h34
Oui, un très beau roman… Impossible cependant de le lire d’un coup…! Je n’ai pas encore lu le billet de George mais j’y cours ! 😉
Commentaire n°4 posté par mango · 4 octobre 2010 à 10h23
Un beau roman certainement que j’aurais mieux fait de lire dans quelques mois seulement pour pouvoir mieux l’apprécier!
Noukette · 5 octobre 2010 à 23h36
Je crois comprendre ce que tu veux dire… Pour les mamans, présentes ou à venir (!?), c’est une lecture douloureuse… Je pense que c’est parce que je suis maman que j’ai ressenti les choses aussi fortement par moments…!
Commentaire n°5 posté par calypso · 4 octobre 2010 à 12h08
Je suis ravie de voir que tu as le même avis que moi sur ce magnifique roman.
Noukette · 5 octobre 2010 à 23h38
Encore un grand merci à toi… ! C’est un livre qui mérite de voyager ! 😉
Commentaire n°6 posté par valérie · 4 octobre 2010 à 12h30
Eh bien, me voilà minoritaire. Par contre, je suis d’accord avec toi, ce n’est pas qu’un roman triste.
Noukette · 5 octobre 2010 à 23h43
Je viens de relire ton avis…, et de rajouter ton lien dans mon billet ! 😉 C’est vrai que ton avis est plus mitigé…, as-tu réussi à mettre le doigt sur ce qui t’a géné ?
Commentaire n°7 posté par irrégulière · 4 octobre 2010 à 12h37
Bon, comme il doit venir voyager chez moi, je l’attends. J’avoue que j’appréhende un peu car je suis très sensible…
Noukette · 5 octobre 2010 à 23h44
Tu ne devrais pas l’attendre longtemps, il est déjà parti…, vers toi je crois ! 😉 J’ai hâte de lire ton avis sur ce livre si singulier…
Commentaire n°8 posté par May · 4 octobre 2010 à 13h01
Il me semble impossible de lire ce roman. Rien que ce que tu en dis me bouleverse. Peut-être qu’au contraire le lire conjurerais tout ce que je suis capable d’imaginer autour… on verra bien si me laisse aller.
Le traitement du sujet est en tous cas très intéressant.
Noukette · 5 octobre 2010 à 23h46
C’est un roman dont on ne sort pas indemne…! Très émouvant, souvent poignant. Si jamais tu te sens le courage de le lire un jour, je serai curieuse de lire ton avis…!
Commentaire n°9 posté par Leiloona · 5 octobre 2010 à 11h07
Bon, au début le titre ne me tentait pas, mais à force de lire vos avis sur ce livre, il me tente. C’est malin ! 😛
Noukette · 5 octobre 2010 à 23h58
je te comprends, c’est fou ce qu’on peut être tenté par certains livres qui déchaînent les passions sur les blogs… Si tu succombes, j’irai lire ton avis avec plaisir ! 😉
Commentaire n°10 posté par Christine · 6 octobre 2010 à 15h52
Je suis comme May, j’ai l’impression de ne pas pouvoir lire un tel livre. Il a l’air douloureux. Cependant, en lisant tous les avis ainsi que le tien, je pense que je vais le noter pour plus tard.
Noukette · 6 octobre 2010 à 23h25
J’avais la même impression que toi avant de le lire, surtout que je suis maman… En plus, je lisais tellement d’avis poignants, certains lecteurs en avaient même abandonné la lecture… J’ai voulu me faire mon propre avis, et je ne regrette pas ! En tous cas, c’est un livre qui marque, c’est sûr !
Commentaire n°11 posté par lenamae · 8 octobre 2010 à 00h15
J’avais noté également ce livre, que je vais sans doute lire.Mais je fais une pause, je viens de finir « Nos étoiles
ont filé » que m’a fait beaucoup pleurer et également sourire. Mais, je pense que ces lectures aussi bouleversantes soient-elles sont un formidable message d’espoir.
Noukette · 8 octobre 2010 à 00h18
Je suis bien d’accord avec toi… Mais si tu viens de lire un tel livre, une petite pause est sûrement nécessaire… « Eugène » est un très beau livre, pas larmoyant pourtant, malgré ce sujet si délicat…!
Commentaire n°12 posté par Sharon · 11 octobre 2010 à 20h56
J’espère lire ce livre un jour, un jour où je ne serai pas trop sensible.
Noukette · 13 octobre 2010 à 01h18
Il faut effectivement être prêt pour cette lecture éprouvante…, mais c’est un très beau livre !
Commentaire n°13 posté par Isa · 12 octobre 2010 à 19h38
Un livre étonnant qui m’a laissé sans voix !
Noukette · 13 octobre 2010 à 01h21
C’est le « mot » ! Une lecture choc qui ne peut pas laisser indifférent !
Commentaire n°14 posté par pimprenelle · 13 octobre 2010 à 11h57
C’est un très beau roman en effet, et comme tu le dis, l’auteur a su éviter l’écueil du pathétique. Ce n’est pas irrespirable mais touchant et très juste.
Noukette · 14 octobre 2010 à 01h03
Pas irrespirable non, même s’il m’a fallu quelques « respirations » pour le mener à bout ! Sujet difficile tout de même, pauvre coeur de maman !!
Commentaire n°15 posté par Karine:) · 23 octobre 2010 à 22h03
Un livre qui semble assurément toucher. Il est dans la liste mais je crois que j’attendrai qu’il sorte en poche. « Raisonnable » is my middle name!
Noukette · 24 octobre 2010 à 10h11
J’aimerais bien que « raisonnable » soit my middle name à moi aussi ! Tu as une solution ? 😉 En tous cas ce livre mérite les éloges qu’il déclenche ici et là, c’est une oeuvre forte qu’on oublie pas !