« Tout reprendre, tout détricoter et retricoter ensuite dans le bon ordre et avec patience. Raccommoder les lambeaux de ce qu’était devenue sa vie, remettre les choses à leur place, reconstituer la logique des évènements, leur lente dégradation, puis l’effet de cette dégradation elle-même dans son esprit, comme une contamination par un virus, avec mutation et progression, enfin démêler les rêves des états de conscience éveillés, expliquer le rôle de chaque élément (…) »
Bertrand Berger-Lafitte fait partie de ces personnages hors-cadre que j’adore rencontrer. Apparemment lisse et sans aspérités, loin de tout, déconnecté du monde et de tout ce qui peut bien graviter autour de lui, préférant de loin se focaliser sur les petits détails et les incongruités du destin qui finalement feront la différence… L’anti-héros par excellence. Et pourtant, si on gratte un peu le vernis, on découvre un personnage des plus attachants, de ceux qui ont finalement peut-être tout compris et ont choisi le meilleur moyen de survivre « sous la vague »…
Mars 2011. Bertrand Berger-Lafitte est directeur général d’une entreprise familiale de cognacs principalement exportés au Japon. Alors qu’un tsunami gigantesque dévaste l’île et voit le marché des spiritueux péricliter, le petit patron regarde un brin dépassé sa petite vie tranquille et ordonnée bousculée par ceux qui auraient dû le soutenir. Son ex-femme travaille dans l’ombre à son éjection du fauteuil de directeur général avec l’aide d’un de ses collaborateurs avec lequel elle s’envoie en l’air, et sa fille Olivia, paresseuse et frivole, se retrouve enceinte d’un de ses ouvriers syndicaliste… Heureusement, il y a l’indéboulonnable et précieux Eddy. Chauffeur personnel et finalement celui qui connait le mieux Bertrand. Pas un ami non… Mais une ombre bienveillante et protectrice, du moins en apparence. Un géant énigmatique adepte des tatouages, des grosses bagouzes, de la gonflette et de la fumette. Un ange gardien discret au passé impénétrable qui supporte sans sourciller les bizarreries de son patron qui a tendance à se se réfugier dans un monde fantaisiste visiblement le seul à même de panser ses blessures les plus profondes…
« Le chaos est un état qui ne peut pas durer. »
Elle est forte Anne Percin… Doucement, l’air de rien, elle nous attire dans sa toile et il devient impossible de se détacher de cette douce folie qui imprègne les pages. L’humour est subtil, les dialogues légers mais lourds de sens, l’atmosphère douce-amère. Le lecteur curieux se mue en témoin indulgent et attendri face au désarroi intime de cet anti-héros finalement bourré de charme. Si tout semble glisser sur lui, il finira par amorcer une lente reconstruction qui a tout d’une véritable révolution personnelle. Une renaissance qui donne le sourire tant la plume d’Anne Percin sait rendre attachants ces caractères inattendus et si modernes, le si charismatique Eddy en tête (à mon sens le vrai héros du roman)… Une vraie réussite !
Première lecture de cette rentrée littéraire que je partage avec mes âmes damnées Jérôme et Moka. Et tenez-vous bien on remet ça dès demain 😉
Les avis de Cathulu et Jostein
Du même auteur sur le blog : Le premier été – Le jour du clip / Je porte la culotte – Ma mère, le crabe et moi
Éditions du Rouergue (Août 2016)
Collection la Brune
208 p.
Prix : 18,80 €
ISBN : 978-2-8126-1103-2
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Challenge 1% rentrée littéraire catégorie « Touche à tout »
chez Hérisson et Léa Touch Book
13 commentaires
Aifelle · 22 août 2016 à 06h31
J’ai aimé tout ce que j’ai lu d’elle ; alors j’ajoute à ma liste de rentrée (très modeste pour le moment, je n’ai encore (presque) rien vu).
Moka · 22 août 2016 à 07h49
Pas de coup de cœur pour ce texte. Un moment plaisant mais des aspects qui auraient gagné à être développés. Toutefois, le regard sur le monde de l’entreprise est mordant à souhait.
Bonne reprise Nouk !
Laure · 22 août 2016 à 07h50
Je n’ai jamais lu cette auteure, j’avais en tête de lire Les singuliers, je vais rajouter Sous la vague 😉
cathulu1 · 22 août 2016 à 08h49
« douce folie », c’est tout à fait ça ! 🙂
Saxaoul · 22 août 2016 à 09h01
Tu es la plus convaincue de vous trois !
Leiloona · 22 août 2016 à 09h27
Ah tiens, après avoir lu le billet de Jérôme je me demandais si le loser qu’est le personnage allait m’intéresser … (du mal avec ceux qui courbent le dos face aux difficultés …), mais ta chronique fait pencher la balance de l’autre côté ! 🙂
yueyin · 22 août 2016 à 10h08
J’ai adoré les Singuliers , je crois que je vais continuer un peu avec l’auteure du coup 🙂
manU · 22 août 2016 à 10h36
J’ai découvert Anne Percin il y a peu et je compte bien lire celui-ci !
krol · 22 août 2016 à 12h18
Et bien quel enthousiasme ! Je te soupçonne de n’être pas très objective avec cette auteure ! 😉
pépita · 22 août 2016 à 12h24
Moi Anne Percin, je ne lis plus, des déceptions dans l’écriture que je trouve trop dans l’envie à tout prix de créer un ton. Et alors cette histoire ne me tente pas du tout ! on a déjà vu au cinéma non ? 🙂
Jerome · 22 août 2016 à 12h36
M’étonne pas que le chauffeur ait ta préférence, un gros dur tatoué, c’est ton truc :p
Alex-Mot-à-Mots · 22 août 2016 à 16h40
Deux lectures communes coup sur coup ? Chapeau !
Sous la vague – Anne Percin – Moka – Au milieu des livres · 22 août 2016 à 01h02
[…] chroniques de mes complices préférés Noukette et Jérôme avec qui je partage cette découverte de la rentrée littéraire […]