« Tout le monde parle de « travail de deuil ». Il n’y a pas de « travail de deuil ». Il y a une infinité de portes ouvertes sur une infinité d’autres portes. Il y a le franchissement d’une succession de sas qui n’isolent de rien et ne favorisent aucun passage. Il y a des jours qui se ressemblent tous dans la stupeur de faits devenus irréversibles : ce mot, ce silence, ce geste, cette musique, cet enfant que l’on n’a pas fait, cette caresse retenue, l’ensemble de se qui ne s’écrira pas ou ne s’effacera plus. »

 

J’ai retrouvé dans Miss Sarajevo ce qui m’avait tant plus dans Le plancher de Jeannot. Des fulgurances d’écriture qui me rappellent pourquoi j’aime tant la littérature française. Une poésie jamais surfaite, des mots bijoux qu’on laisse couler et qu’on ressent profondément, de façon presque viscérale. Des personnages incarnés qui habitent tellement les pages qu’il est douloureux de les quitter. Une histoire qui se tisse lentement, faite de l’étoffe des souvenirs et de ces morceaux de vie qui marquent au fer rouge. Une voix, tout simplement…

 

Paris, 2017. Entre deux reportages à l’autre bout du monde, Joaquim a tout juste le temps de se poser dans son minuscule appartement envahi de carnets et de caisses d’archives. Une vie en transit. L’idéal pour ne pas être assailli par les souvenirs. Mais on n’oublie jamais rien. On fait avec. On éloigne les images. Tant qu’on le peut… Des images qui se rappellent à lui alors qu’il vient d’apprendre la mort de son père. Obligé de se rendre à Rouen dans l’appartement familial qui renferme tant de douloureux échos, Joaquim fait défiler le film intime de ses névroses…

 

Sarajevo, 1993. Joaquim a vingt ans quand il arrive dans la capitale assiégée. Il était urgent de fuir. Il était urgent de vivre… Dans un décor de fin du monde où la mort attend en embuscade, Joaquim affronte ses peurs pour finalement mieux renaitre, loin du joug des souvenirs et du poids du passé. Car au milieu du chaos survivent quelques éclats de vie. Des étincelles de beau. Des pieds de nez au destin…

 

Il y aurait tant à dire sur ce roman qui m’a subjugué de bout en bout. Admirablement construit, magnifiquement écrit, il dit la petite histoire et la grande, l’agonie du monde, les images qui s’impriment durablement sur la rétine, l’urgence silencieuse et les révolutions intimes… Tant de résonances dans ces mots là. Tant de ponts. Tant de mises à nu. Il y a une grâce, une délicatesse et une vraie intensité dans les mots d’Ingrid Thobois. Et la patte d’un très grand écrivain ♥

 

Un coup de cœur de cette rentrée que je suis ravie de partager avec Jérôme. Krol en parle aussi aujourd’hui, un autre éclairage sur ce roman.

 

Les avis de Alex, Antigone, Kathel

 

Le blog de l’auteure

 

Éditions Buchet-Chastel (Août 2018)

Collection Qui Vive

212 p.

 

Prix : 16,00 €

ISBN : 978-2-283-03095-0

 

By Hérisson


19 commentaires

Emma · 26 août 2018 à 08h51

Il paraît bien tentant 🙂

Antigone · 26 août 2018 à 09h02

Il faut que je lise d’autres titres de cette auteure.

    Noukette · 27 septembre 2018 à 23h18

    Si tu ne l’as pas lu, je crois que tu aimerais beaucoup Le plancher de Jeannot !

krol · 26 août 2018 à 10h01

J’ai largement préféré Le plancher de Jeannot mais je ne sais pas trop exprimer pourquoi…

    Noukette · 27 septembre 2018 à 23h17

    Les deux romans sont très différents finalement. Reste la langue, sublime…

nicolemotspourmots · 26 août 2018 à 16h49

Je lis pas mal de choses autour de ce petit roman… de quoi titiller ma curiosité 🙂

    Noukette · 27 septembre 2018 à 23h16

    D’ailleurs je m’étonne que tu ne lui aies pas encore fait une petite place dans ton programme de lecture ! 😉

jerome · 27 août 2018 à 13h54

Aucune fausse note pour moi dans ce roman, tu le sais 😉
Et puis quelle écriture !

    Noukette · 27 septembre 2018 à 23h16

    Tout à fait le genre de roman que j’aime découvrir…! Parfait oui !

Alex-Mot-à-Mots · 27 août 2018 à 20h29

J’ai aimé la langue de l’auteure, que je découvrais. Je suis plus mitigée quant l’histoire.

    Noukette · 27 septembre 2018 à 23h15

    Oui, j’avais vu ça. Pour ma part, je l’ai aimé sans réserves 😉

Moka · 28 août 2018 à 07h52

Tu n’es pas la première à être à ce point conquise !
Je le lirai.

    Noukette · 27 septembre 2018 à 23h14

    J’espère vraiment que tu le liras oui, j’aimerais que tu l’aimes autant que moi…! 🙂

Saxaoul · 30 août 2018 à 13h11

Il commence à faire parler de lui ce roman !

Yueyin · 25 septembre 2018 à 07h29

Je vais finir par me laisser tenter par tous ces beaux echosnsur ce roman

Fanny · 8 octobre 2018 à 20h27

Je viens de le terminer…une beauté! <3

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